Je préférais encore le VVF

Je me suis demandé si je devais vous dire où j’étais ces deux dernières semaines. Et finalement, oui. Pourquoi pas ? J’étais à l’hôpital. Rien de bien grave, rien en rapport direct avec Papillotte (qui a l’air de bien s’amuser : je sens ses gesticulations depuis quelques jours !), rien que de très très chiant, cependant.

Essayez de ne pas être hospitalisé. Vraiment. Après vous être pris la tête aux admissions sur l’absence inexpliquée de votre carte de mutuelle, vous serez consigné dans une chambre minuscule, avec des WC, mais la douche dans le couloir - à partager avec des dizaines d’autres gens pas tous très bien portants. On vous perfusera des saloperies et vous ferez du pipi qui pue. L’élève infirmier restera de longues minutes à compter les gouttes qui tombent de la poche, la montre à la main, et reviendra deux fois pour rien parce que vos veines sont espiègles et génèrent des débits effrontément irréguliers. On vous portera, trois fois par jour, les petites drogues que vous avez l’habitude de prendre tout seul comme un grand depuis 20 ans, mais une fois sur deux vous n’aurez pas de verre pour diluer les médicaments en poudre. Bien entendu, vous mangerez de la merde à tous les repas. On vous servira votre plateau du soir à 18h30, et une fois que vous aurez tout avalé avec héroïsme, vous vous endormirez du sommeil du juste, terrassé par l’ennui. A 23h30 l’équipe de nuit vous réveillera en faisant sa ronde. On vous dérangera à toute heure de la nuit pour vous prendre la tension, comme si vous risquiez d’exploser sans sommation, ou simplement pour vous demander si tout va bien, comme si vous donniez l’air de préparer sournoisement une petite mort subite du nourrisson. Vous entendrez toute la nuit les sonnettes des autres patients à l’agonie ainsi que le téléphone auquel personne ne semble jamais vouloir répondre. Les infirmières trimballeront des chariots grinçants et papoteront bruyamment dans le couloir. Une surveillante piquera une crise et enverra valser plusieurs objets lourds contre votre porte, heureusement fermée - mais vous serez quand même au bord de la crise cardiaque. Vous vous ferez engueuler par une infirmière inconnue, appelée en renfort, parce que votre cathéter montre des signes de faiblesse et qu’elle n’a “pas le temps de vous reperfuser maintenant, hein !”. Au matin, vous devrez recevoir, sans frémir, les aides-soignantes, les agents de service, la diététicienne, le kinésithérapeute, l’interne (à soigner : il signera votre permission de sortie pour l’après-midi), l’externe, à qui vous devrez répéter tout ce que vous avez déjà dit à l’interne, et si vous avez de la chance, le grand chef à qui vous raconterez tout une troisième fois et qui ne fera pas sa priorité de répondre à vos questions comme si vous étiez un être sensé, capable de comprendre ce qui vous arrive. Un jour, vous verrez même la psychologue, à qui vous aurez envie de dire qu’elle arrive un peu tard (il y a seulement six mois vous aviez tant de choses à dire !) et devant qui vous tairez pudiquement votre envie d’envoyer tout ce petit monde vérifier si le zoo de San Francisco héberge un éléphant à trois testicules.

Néanmoins, quelques personnes vous appeleront tous les jours, et votre amour viendra vous voir aussi souvent que possible. Certaines aides-soignantes seront formidables, certaines infirmières diablement jolies. Vous aurez peut-être le droit de sortir tous les après-midi et vous pourrez alors ratrapper votre retard en matière de cinéma. Votre Couz viendra vous voir bien qu’ayant atterri la veille des Etats-Unis et bossant le lendemain, et vous apportera une douzaine de paquets de Big Red qui arrachent la gueule. Des amis vous offriront l’asile sanitaire de leur baignoire. ^ ^ râlera qu’il n’aime pas venir sur Paris mais vous pourrez tout de même manger un bol de udons en sa compagnie dans la rue Saint Anne. Vous verrez même votre parrain avec qui vous comparerez vos expériences hospitalières respectives, et votre Tata vous offrira des livres. Et quand vous reprendrez le travail, tous vos collègues vous accueilleront comme un vétéran du Viêt-Nam.

N’empêche, pendant ce temps là , vous n’aurez pas beaucoup blogué.

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Maggie

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09 2007

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  1. 1

    Pff, encore deux lignes et on se croyait dans Les Misérables, ’spèce de frimeuse…

    Nan, je déconne. Content de te re-lire.

    Mais si je voulais faire du mauvais esprit, je dirais que tout ça, c’est arrivé parce que tu n’avais pas le ron… pardon, le Bon infirmier, of course! :wink:

  2. kiwis #
    2

    Contente que tu sois de retour!
    :grin:

  3. 3

    Rhôoooo ! Mais c’est un scandale! Il faut faire des procès à tous ces gens mauvais. Mais maintenant ça va mieux. Hein? Dis? Mais t’étais où, dans quel hôpital parisien? J’aurais pu te ramen-er un bol de nouilles qui font du bruit de succion pornographique!!! Pas bien, ça, de ne pas me dire tout! Alors que malheureuse je t’ai ramassée sur le trottoir un après-midi d’été. :grin:
    Des bisouilles, et la papilotte, c’est quel thermostat déjà ?

  4. 4

    ça c’est de l’hopital Cochon tout craché !
    hum… une petite impression de deja vu, tout ce que tu decris !

  5. Tata Maggie #
    5

    Et t’as vu, je me suis censurée : je parle même pas de la statue moche :neutral:



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