Difficile petit rat

C’est pas tout, ça, mais maintenant que j’ai fini les Chroniques de San Francisco, je dois me trouver autre chose à lire.

Commencer un livre est pour moi une opération très compliquée. Depuis toujours. Je peux passer une heure dans une librairie ou à la bibliothèque, je furète entre les rayons de façon désordonnée, le cou perpendiculaire pour lire les titres sur les tranches, et je peux tout à faire ressortir sans rien avoir choisi du tout. Je suis extraordinairement difficile. Déjà petite, les gens m’offraient des livres parce qu’ils savaient que je lisais beaucoup (il n’y avait pas de télé à la maison et ma consommation s’élevait à au moins deux romans par semaine) ; je n’en ouvrais pas la moitié. Je n’essayais même pas de les commencer : ils allaient moisir sur une étagère, délaissés, vexés peut-être, d’autant plus que ce n’était souvent que délit de sale gueule.

Je ne peux pas lire un livre qui ne me plaît pas physiquement. Bien sûr, le titre importe, le résumé de la quatrième de couverture aussi, et l’écho que j’ai pu éventuellement en avoir par quelqu’un ou par un magazine. Mais j’ai des critères beaucoup plus superficiels. Il faut que ce soit un livre de poche. Je n’aime pas les grands formats. Il faut qu’il soit de la bonne édition (10-18, Points, Pocket ou àla rigueur Folio). Je viens de me faire violence et d’acheter Virgin Suicides bien qu’il ait paru chez J’ai Lu (je déteste le logo) ; je voulais lire le roman mais répugnais à l’acheter depuis plus d’un an pour cette unique raison. Il faut que la couverture soit belle (je me retiens d’acheter à nouveau Middlesex parce qu’ils l’ont réédité avec une couverture différente vachement plus sexy). Il faut de préférence que ce soit un pavé, et un vrai, pas écrit en gros : il faut que ça dure (je lis à une vitesse qui énerve les gens, c’est pourquoi je lis de temps en temps un bouquin en anglais, ça me mate). Les livres, c’est comme les filles : j’aime pas quand c’est maigre. J’aime faire défiler les pages avec le pouce et que l’épaisseur molle d’un roman de six cents pages fasse “flop flop flop”. A cause de ça j’ai une petite préférence pour les Points ; la couverture des 10-18 est un peu trop rigide pour que le plaisir soit complet. Certaines éditions moins connues ont des proportions et un toucher vraiment agréables, ce qui m’a conduit à lire Chinoises (Xinran), chez Piquier Poche, un livre excellent et poignant que je recommande (bien que je déteste le mot “poignant”).

Mais je n’aime pas avoir plusieurs tomes. J’ai le Seigneur des anneaux, version originale, en un seul volume, couverture souple, plus de mille pages, on dirait une Bible. Je l’adore, bien que je ne soit pas allée au delà de la page 177 (marquée avec le ticket d’entrée de la maison de Pierre Loti à Rochefort). J’ai lu dans mon adolescence Les Misérables dans une vieille édition en un volume unique, écrit sur trois ou quatre colonnes, un vrai plaisir. J’aimerais le relire, mais pas en plusieurs tomes. Comme je le trouve pas d’une seule pièce, je renonce à chaque fois.

En revanche je n’ai rien contre les séries, mais attention, je veux tous les tomes dans la même édition. J’ai tout de même fait exception pour Harry Potter, ayant acheté les tomes 1 à 4 en version originale poche, mais n’ayant pas pu attendre pour me procurer les suivants dès leur sortie. J’ai donc 4 Harry Potter brochés et 3 cartonnés avec jacquette. Il faudra remédier à cela un jour, c’est sûr, en achetant la version poche des trois derniers, puisque je préfère les poches, bien entendu.

J’ai aussi quelques exigences sur le contenu (j’en ai quand même un peu dans la cervelle). Je n’aime pas les policiers (surtout enrobés d’un contexte historique). Je ne suis pas attirée par les ambiances exotiques (parce qu’elles me ramènent à ma certitude d’être nulle en voyages). Mais je ne lis presque que des romans anglo-saxons (j’ai l’impression qu’aucun auteur français n’est capable d’être assez original et déjanté). Je me sens incompétente pour la science-fiction (sauf Les Robots d’Asimov) et la fantasy (ça m’a suffit d’aller au caté quand j’étais môme). Je ne lis jamais de livres pour filles (autrefois c’était Mary Higgins Clark, monotone comme le ciel de Chartres ; de nos jours c’est ces trucs genre Sex and the City avec des célibattantes qui font semblant de ne pas chercher ce gland de prince charmant). Je ne veux plus rien lire (ni voir, d’ailleurs) sur la Seconde Guerre Mondiale, j’en ai ma claque de toute cette horreur (j’y suis pour rien, j’étais pas née et mes vieux non plus, d’abord).

J’aime bien les sagas familiales (où tout le monde a un grain), les personnages normaux (c’est à dire : qui ne bossent pas dans la pub) mais originaux (ils cultivent les vers à soie), qui se croisent les uns les autres (tout le monde couche avec le même mec). Par dessus tout, et je ne passe rien à l’auteur à ce sujet : il faut que ce soit bien écrit. Là , normalement, ça énerve ^ ^ qui déteste que je critique le style d’un livre ou d’une chanson (je suppose que je devrais dire “je n’aime pas comme c’est écrit” à la place de “c’est de la merde”, mais à chacun ses petits tics de syntaxe). Mais je n’en démords pas.

Prenons un exemple. J’ai acheté Les yeux jaunes des crocodiles (Pancol) avec le chèque de Noël du comité d’entreprise. Ma Couz m’avait dit que c’était très très bien. La couverture me plaisait. L’épaisseur aussi. J’aurais du me méfier du résumé, pourtant : “Ce roman parle des hommes. Et des femmes. Celles que nous sommes, celles que nous voudrions être, celles que nous ne serons jamais, celles que nous deviendrons peut-être”, effectivement, j’aurais du voir que ça s’annonçait fort mal. Résultat, je suis engluée à la page 197. Je m’emmerde sec. Le style est plat. Les personnages mous. L’intrigue n’avance pas. Les situations sont caricaturales. Tout est téléphoné, rien ne me surprend. Rien n’est crédible. Vous y croyez, vous, à une ado qui utilise l’expression “le comble du luxe” ? On dirait un bon vieux sitcom. Gros gâchis de papier, gros gâchis de temps, gros gâchis de chèque de Noël du comité d’entreprise. Le roman a reçu le prix 2006 de la Maison de la Presse. Ceci confirme que ce n’est pas en vendant Voici qu’on attrape la fibre littéraire. Depuis l’auteur a sorti La valse lente des tortues. Je m’interroge : est ce qu’elle va s’attaquer à tous les reptiles ? Le prochain, c’est “Le vaste trou du cul des iguanes”. (Oui, je suis sans pitié ; vous comprenez ^ ^ maintenant. Mais je suis frustrée, je gère comme je peux, hein.)

Lors de ma dernière descente à la Keufna, j’ai donc aquis Virgin Suicides (j’emprunte des bouquins à la médiathèque, bien sûr, mais je préfère toujours les acheter, pour les garder, les relire, en essayant de ne pas marquer la tranche de pliures, et les prêter quand je les aime vraiment). J’ai aussi choisi Geisha, que je voulais lire depuis longtemps, et Une situation légèrement délicate, puisque j’avais aimé Le bizarre incident du chien pendant la nuit. J’ai longuement hésité devant Ambiguïtés, vanté il y a peu par Matoo, mais je ne sais pas pourquoi, ça fait deux fois que je le feuillette puis le repose sur le rayon. J’ai eu envie de prendre aussi Jonathan Strange et Mr Norrell, mais je ne suis pas sûre que ça va me plaire au delà de la couverture noire et du nombre alléchant de pages.

Je suis embêtée. Quoi lire ensuite ???

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Maggie

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03 2008

14 Comments Add Yours ↓

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  1. 1

    “Je me sens incompétente pour … la fantasy (ça m’a suffit d’aller au caté quand j’étais môme)”
    ENORME ECLAT DE RIRE dans mon bureau!
    Sinon quoi te faire lire? Chais pas!
    Pourquoi tu ne l’écris pas toi même ton prochain roman? Hein? Dis?

  2. 2

    William Gibson. Tout.
    Mais c’est un peu de la “SF”.
    Mais c’est quand même lui qui a inventé le cyberespace :grin:

  3. Me #
    3

    Pennac ?

  4. 4

    Naaaaaaaaaaaaan. PAS Pennac!

  5. ceth #
    5

    Tu peux peut être tenter “Jeux de maux” de David Lodge…

  6. ceth #
    6

    et les sagas “les aventuriers de la mer”ou “l’assassin royal” de Robin Hobb… on nage en pleine fantasy…mais Moise à côté c’est de la rigolade!

  7. kiwis #
    7

    Eat, pray and love de Elizabeth Gilbert (dur au depart a se mettre dedans mais j’ai aime…)
    Chicago de Alaa El Aswany (histoire d’egyptiens a Chicago).
    Luz ou le temps sauvage d’Elsa Osorio

    J’ai aime et comme souvent je te pique tes idees de bouquins, peut etre que t’aimeras… Les prochains pour ma part: tales of the city :) j’ai suivi tes conseils!!! can’t wait que la bibliotheque m’apelle pour me dire qu’ils sont la! (peux plus acheter, trop lourd a ramener et je peux pas me separer des bouquins…)

    bizes

  8. mumoldue #
    8

    tu n’aimes pas les polars, mais tu devrais essayer Fred Vargas…

  9. 9

    Je te conseille “Jamais sans ma fille” de Betty mamoodi
    Lol :grin:

  10. Alix #
    10

    Des lectures qui m’ont marquée, pour des raisons bien différentes :
    - The remains of the day (Les vestiges du jour) - Kazuo Ishiguro. Je l’ai trouvé nul jusqu’à la moitié, puis génial jusqu’à la fin. Le film adapté n’est d’ailleurs pas mal du tout, avec Tom Hanks en plus.
    - L’importance d’être constant - Oscar Wilde. Un coup de coeur. C’est une pièce de théâtre bourrée de quiproquos, ce n’est pratiquement que de comique de situation, avec en plus plein de personnages, puisque tu aimes ça.
    C’est l’un des rares livres pour lesquels j’ai eu de vrais éclats de rire en lisant. C’est pas très intellectuel, c’est même plutôt léger, mais Wilde avait un style extraordinaire.

  11. 11

    J’ai adoré “L’élégance du hérisson” de Muriel Barbery, c’est assez inclassable, ça parle de personnages hauts en couleurs, les personnages principaux sont une concierge intelligente et cultivée qui fait tout pour éviter que ça se sache, et une ado japanophile qui se fout de sa famille de bourges et qui a résolu de se suicider à 15 ans (ou 16 ou 17, je sais plus). Ce sont les 2 narratrices, et les alternances de styles sont très drôles. La façon de raconter les attitudes et les situations est tordante par moments. J’ai eu du mal à décrocher avant d’avoir fini…

  12. 12

    Dommage que tu n’aimes pas tout ce qui touche à l’historique, car les “Bienveillantes” de Jonathan Littell est vraiment génial. Dans le même genre, je rafolle du style de Louis-Ferdinand Céline ou de Bret Easton Ellis… Ou encore Chuck Palahniuk, un régal!
    Bonne chance dans ta quête aux livres :)

  13. ^ ^ #
    13

    Tiens, je ne pensais pas devenir le défenseur des auteurs ratés :wink:

  14. Maggie #
    14

    Voilà à quoi ça mène de toujours dire le contraire ! :razz:



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